La France hospitalo-universitaire se reconstruit
Six programmes immobiliers annoncent le CHU du futur. Anticiper les évolutions de la médecine, satisfaire les attentes des patients, rester suffisamment souples pour imaginer avec eux et avec les équipes de nouveaux process d’organisation, donner toute sa place à la recherche, renforcer les synergies avec la métropole et les autres établissements du territoire, accroître l’attractivité et faire rayonner la transmission des savoirs et l’excellence française en matière de soins… Tels sont les grands enjeux des projets immobiliers entrepris depuis 10 ans dans les 32 CHU de France. De nouveaux programmes de modernisation se préparent pour un investissement total de près de 7 milliards d’euros.
Parmi eux, 6 projets concernent des chantiers d’ampleur avec la reconstruction du site principal à Caen, en Guadeloupe, à Nantes, à Reims et à Rennes. Le 6ème, le « Campus Hospitalo-Universitaire Grand Paris-Nord » est un hôpital couplé à une faculté. Le montant total de l’ensemble de ces opérations dépasse les 4 Mds d’euros.
Tour de France de l’architecture hospitalo-universitaire du futur en 6 opérations emblématiques
Caen change de ciel
A Caen, la Tour Côte de Nacre, haute de 86 mètres, qui dominait le site va s’effacer pour être remplacée par 6 grands secteurs hospitalo-universitaires d’une superficie totale de 110 000m² et d’une capacité de 1 049 lits et places. Les travaux s’échelonneront de 2020 à 2026 pour un montant de 502 M€.
Vue aérienne du futur site de Caen ©AIA Architectes
Le nouveau CHU de la Guadeloupe, un projet majeur pour l’archipel
En partie détruit après l’incendie de novembre 2017, le CHU de la Guadeloupe va être reconstruit à Perrin aux Abymes sur un terrain de près de 19 hectares. D’une capacité d’accueil équivalente de 618 lits et places, l’établissement s’étendra sur 85 000 m2. Le programme immobilier d’un montant de 580 M€ répond aux normes parasismiques de l’Eurocode 8. Les travaux débutés en 2018 s’achèveront en 2022.
Reconstruction du CHU aux Abymes (Guadeloupe) @Architecture Studio, Babel Architecte
Nantes, la construction d’un campus hospitalo-universitaire de centre ville
Nantes a lancé l’opération de la construction de son futur CHU, projet urbain majeur qui sera implanté au bord des rives Loire, sur l’île de Nantes. Cœur du futur quartier de la santé, il regroupera sur un site unique les activités MCO du CHU et un Institut de Recherche en Santé, l’IRS 2020, dédié aux équipes de recherche labellisées «départements hospitalo-universitaires». Disposés selon une organisation concentrique, ses bâtiments occuperont 225 000m² pour une emprise totale de plus de 10ha. Le futur CHU comptera 1 384 lits et places, disposera de 54 salles de bloc et prévoit de réaliser 64% des séjours en ambulatoire. Les travaux seront lancés en 2020 et s’échelonneront sur 6 ans. L’ouverture du site est prévue en 2026. Budget de l’opération : 953 M€.
Le CHU, cœur du futur quartier santé de l’île de Nantes – Architectes équipe Art&Build, Pargade
Paris, naissance d’un hôpital couplé à une faculté d’odontologie et à des équipes de recherche
L’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris va édifier un nouvel hôpital à Saint-Ouen (93) issu du regroupement des hôpitaux Bichat et de Beaujon, d’une faculté d’odontologie et d’activités de recherche en santé de l’université Paris-Diderot et de l’Inserm, une première ! Le Campus hospitalo-universitaire Grand Paris Nord s’étendra sur 200 000 m2 dont 130 000 m2 pour les activités hospitalières et 70 000 m2 pour les activités d’enseignement et de recherche. L’hôpital abritera 989 lits et places. Montant total : 900M€.
Soins, enseignement, recherche en un campus au Nord de Paris ©AP-HP
A Reims, le CHU de demain sera collaboratif et rayonnant
Reims reconstruit son site principal et démolit les Hôpitaux Robert Debré et Maison Blanche. Les nouveaux bâtiments, qui compteront 806 lits et places, regrouperont les activités de médecine et chirurgie adulte. Les chambres avec vue sur la ville ou les coteaux champenois seront à majorité individuelles (85%) et équipées de wifi pour satisfaire aux attentes des patients en matière d’intimité, de connectivité et d’agrément. Début des travaux en 2019 fin en 2027. Montant : 410 M€.
Le CHU de Reims à horizon 2027 – ©Groupe-6 architectes
A Rennes, un CHU à taille humaine sur le site de Pontchaillou
Rennes projette de reconstruire le site de Pontchaillou, en centre-ville. Le dossier est actuellement en cours d’instruction en Comité interministériel de la Performance et de la Modernisation de l’Offre de Soins Hospitaliers (COPERMO) et la première opération, le Centre Chirurgical et Interventionnel, est en cours de consultation auprès de concepteurs-constructeurs. Le site abrite 1 596 lits et 206 places. Les travaux débuteront en 2019 et s’achèveront en 2026 pour un investissement de 535 M€.
Site actuel de Pontchaillou ©CHU de Rennes
Projets d’ampleur
Limoges mise sur un CHU compact offrant un plus grand confort d’usage. En janvier 2017, Limoges a posé la première pierre de l’hôpital Dupuytren 2 de 347 lits et places. Montant : 320M€. Son programme de modernisation prévoit aussi de restructurer le bâtiment principal (280 M€). Les deux opérations vont se poursuivre jusqu’en 2025.
Marseille lance un plan de modernisation et de rénovation des unités d’hospitalisation qui prévoit la reconstruction d’une maternité adossée à l’hôpital d’enfants de la Timone, la création d’unités de chirurgie ambulatoire, de plateaux de consultations et d’hospitalisation de jour dédiés et la mise en sécurité les bâtiments. Le programme lancé en 2019 s’étendra jusqu’en 2025. Montant : 300 M€.
Nice repense entièrement son organisation et élabore un vaste programme de construction et regroupements d’activités sur trois sites Pasteur, Archet et Cimiez. Les travaux s’échelonneront de 2018 à 2022. Montant : 315 M€.
Paris « Le Nouveau Lariboisière » L’hôpital de 51 500 m², dont 43 200 m² construits et 8 300 m² restructurés, comptera 610 lits et 65 places de jour. Initié en 2018, le chantier sera entièrement achevé en 2024. Montant : 315 M€.
Tours construit un nouvel hôpital à l’image de ses ambitions. Le nouvel hôpital Trousseau (NHT) d’une superficie de 70 000m² comptera 576 lits et places dont 388 d’hospitalisation. Montant : 250 M€. Le CHU a également lancé un programme de restructuration de manière à regrouper ses activités sur 2 sites au lieu de 5. Débutés en 2021, les travaux se termineront en 2025. Montant : 320 M€.
Le CHU de demain, entre technologie et humanité
Philippe Sudreau, directeur général du CHU de Nantes, Président de la commission architecture ingénierie, de la Conférence des directeurs généraux de CHU
Ces 6 grands projets hospitaliers matérialisent « le CHU de demain » et ses principales caractéristiques : la modernité et l’innovation, l’importance de la connectivité et du numérique, l’attention portée à la l’humanité des bâtiments, en termes de confort pour les patients comme pour les professionnels. Ces hôpitaux intégrés à la métropole, ouverts sur leurs partenaires, accueillants pour tous, sont de véritables projets urbains, à l’image de l’hôpital, ville dans la ville. A l’intérieur, la modularité des espaces satisfait aux exigences des évolutions constantes de l’offre de soins. Ces différents sites incarnent ainsi « l’hospitalité universelle » ; socle fondateur de l’hôpital public, sur lequel les CHU ont édifié leurs missions d’excellence pour tous dans les soins, l’enseignement et la recherche.
L’ampleur de ces projets répond à une nécessité au vu de l’activité des CHU, de leur dynamisme et de leur rôle de pivot dans l’offre de soins. Hôpitaux de recours pour leur ville, leur département, leur région, voire à l’échelle nationale et internationale, les CHU doivent disposer d’un plateau technique de pointe, innovant et de taille, répondant aux besoins des interventions les plus sophistiquées. Ils doivent dans le même temps, être en mesure de dispenser des soins de proximité, pour tous.
Les bonnes conditions d’exercice des professionnels sont aussi, dans ce contexte, des facteurs de qualité et de sécurité pour le patient. Les futurs hôpitaux seront des établissements très performants, au caractère profondément humain. Même dans des structures couvrant des dizaines de milliers de m², il est possible de privilégier l’humain, en apportant des réponses empathiques soutenues par une technologique optimale. L’hôpital moderne est conçu pour associer sans restriction technologie et humanité, par la création d’un environnement à la fois technique, chaleureux, protecteur et réconfortant pour le patient. Le concept architectural de « healing hospital » se tient ainsi au cœur de ces projets. Ces nouveaux hôpitaux seront intrinsèquement « thérapeutiques » s’ils réussissent à offrir un écrin adapté aux soins hospitaliers, comme à créer les conditions d’une « expérience patient » optimale, favorable aux soins.
L’architecture hospitalo-universitaire d’avenir réunira les partenaires de l’hôpital. Ouverte sur la ville, cette architecture se fera l’outil de tous les professionnels qui composent le CHU. La meilleure architecture hospitalière est celle co-construite par les différents acteurs qui en ont finalement l’usage au quotidien : professionnels hospitaliers, dans leur diversité et leur complémentarité, usagers et patients dans leurs spécificités, et partenaires au sens large. L’intelligence collective offre dans ce sens un regard véritablement inspiré de l’avenir de l’hôpital. Le futur de l’hospitalité ne doit pas uniquement être pensé par une quinzaine de dirigeants que les responsabilités éloignent de la réalité quotidienne des services. Chaque collaborateur doit être sollicité et doit être une force de proposition. Le CHU de demain doit s’ancrer dans une culture partagée et s’enrichir des expertises de chaque partie.
Source : reseau-chu.org – Décembre 2018